jeudi 29 novembre 2007

L'Histoire par l'image




Résumé du livre d'Eric Godeau " Ces images qui nous racontent le monde", Albin Michel :
300 photographies de l'agence magnum nous racontent le monde depuis 1948.Comment comprendre le monde d'aujourd'hui sans connaître son histoire récente ? Comment transmettre aux jeunes générations l'esprit des décennies écoulées depuis la Seconde Guerre mondiale, l'enchaînement des conflits, les révolutions technologiques, l'évolution des mentalités? Pour raconter cette histoire, Magnum, la prestigieuse agence internationale de photoreportage, nous a ouvert ses archives.Chaque image sélectionnée, replacée dans son contexte, parfois commentée par le photographe lui-même, devient un lieu d'échange, une incitation à la réflexion, l'occasion de clarifier un monde où se croisent trois générations. Ce livre de référence est tout à la fois un outil de connaissance, un creuset de souvenirs et un grand livre de photographies.

Présentation :
En tout, ce sont près de 300 images de l’agence Magnum, choisies avec justesse et pertinence, qui permettent d’appréhender le monde depuis 1948 à travers la photographie. Et c’est là justement tout l’enjeu de l’ouvrage, dans lequel le texte se met au service de la photographie, et non le contraire. Ici, c’est l’image qui permet d’accéder à l’information. Chaque cliché est expliqué, placé dans son contexte, parfois même commenté par son auteur. L’analyse se prolonge par des slogans de l’époque et des citations clés. Saluons également le travail iconographique, d’excellente qualité (Magnum oblige).
Divisé en six chapitres (un par décennie), des années 50 à 2000, le livre se veut être un véritable outil pédagogique : repères temporels, notices biographiques sur les photographes, index des photographes, index général thématique. C’est en effet une manière divertissante, pour tous, de comprendre le monde d’aujourd’hui à travers son histoire. Bref, un ouvrage à la fois pratique et instructif, un merveilleux cadeau de Noël…Céline Chevallie : En tout, ce sont près de 300 images de l’agence Magnum, choisies avec justesse et pertinence, qui permettent d’appréhender le monde depuis 1948 à travers la photographie. Et c’est là justement tout l’enjeu de l’ouvrage, dans lequel le texte se met au service de la photographie, et non le contraire. Ici, c’est l’image qui permet d’accéder à l’information. Chaque cliché est expliqué, placé dans son contexte, parfois même commenté par son auteur. L’analyse se prolonge par des slogans de l’époque et des citations clés. Saluons également le travail iconographique, d’excellente qualité (Magnum oblige).Divisé en six chapitres (un par décennie), des années 50 à 2000, le livre se veut être un véritable outil pédagogique : repères temporels, notices biographiques sur les photographes, index des photographes, index général thématique. C’est en effet une manière divertissante, pour tous, de comprendre le monde d’aujourd’hui à travers son histoire. Bref, un ouvrage à la fois pratique et instructif...(Céline Chevallie)
Par ailleurs, vous pouvez accéder ici au blog de l'agence Magnum.

vendredi 23 novembre 2007

L'art de la photographie

Présentation : Treize ans après la dernière histoire générale de la photographie publiée en France, les éditions Citadelles & Mazenod annoncent la parution d'une nouvelle somme, qui fait entrer le médium dans la célèbre collection "L’Art et les grandes civilisations". Grâce à la collaboration des meilleurs représentants de la jeune génération d'historiens de l'art et de la culture, cet ouvrage se donne pour objectif de restituer les plus récentes orientations de la recherche dans une synthèse accessible à tous, accompagnée pour la première fois d'une illustration entièrement en quadrichromie.
L'originalité de ce volume est triple. Plutôt que de prétendre à une histoire exhaustive de toutes les manifestations de la pratique photographique, il recadre la préoccupation historique autour du dialogue entretenu depuis ses origines par l'enregistrement mécanique avec les domaines de l'art et de la culture. Ce faisant, il présente la première histoire critique de la tradition photographique, dont il révèle les articulations et les contradictions. Mais sa principale caractéristique est la proposition d'un nouveau récit, construit, charpenté, lisible. Une histoire à lire, une histoire qui explique et éclaire une trame dense de près de deux siècles, d'une rare complexité : voici ce qu'offre un ensemble cohérent de textes, voués à dégager l'économie des mécanismes généraux, dont plusieurs sont décrits pour la première fois. La synthèse que nous proposons est, comme de coutume, un état provisoire d'un savoir en marche. Elle se veut conforme à la mission de l'histoire, qui est d'apporter du sens, non d'augmenter la confusion.
Images inédites ou icônes fameuses, documents étonnants ou œuvres d’art célèbres, l'ouvrage présente en dix chapitres et près de 600 illustrations un parcours à la fois savant et séduisant. Un nouveau récit des origines dévoile le rôle du monde de l'art dans la première réception du médium, mais aussi la vitalité apportée par le commerce ou l'importance du dialogue franco-américain. Plutôt qu'une histoire articulée par le tête-à-tête du photographe et sa machine, le volume souligne en permanence l'apport essentiel des institutions: sociétés, publications, expositions ou musées. Pour les amateurs victoriens comme pour les directeurs de journaux, pour les scientifiques comme pour les artistes, l'image construite s'avère un ressort majeur du dynamisme du médium, non moins puissant que sa fonction classique de traduction fidèle du visible. Parmi les apports inédits de l'ouvrage, signalons encore une nouvelle synthèse du rôle de la photographie dans les sciences, la première histoire graphique de la presse illustrée, ou une analyse contextualisée du rôle du MoMA. Au total, l'image qui se dégage est bien une image nouvelle: non plus celle d'une photographie servante des arts et des sciences, mais celle d'un médium acteur de l'art, de la culture et du savoir, opérateur de quelques-unes des évolutions décisives du monde moderne.
L’Art de la photographie, des origines à nos jours.
Sous la direction d'André Gunthert et Michel Poivert
Citadelles & Mazenod, coll. L'art et les grandes civilisations. 620 pages, 25,5 x 32 cm, 566 illustrations.
Sommaire : Introduction, par André Gunthert et Michel Poivert
1.
La génération du daguerréotype- La rencontre de la machine et de l’homme (1839-1851), par Paul-Louis Roubert.- Le daguerréotype aux Etats-Unis : un art social (1839-1861), par François Brunet.
2.
L’institution d’une culture photographique- Une aristocratie de la photographie (1847-1861), par André Gunthert.
3.
Aux limites du savoir- La photographie et les sciences de l’observation (1845-1900), par Marta Braun.
4.
La volonté d’art- De la photographie victorienne au mouvement pictorialiste (1857-1917), par Michel Poivert.
5.
Le jeu des amateurs- L’expert et l'usager (1880-1910), par Clément Chéroux.
6.
Les formes de l’information- De la presse illustrée aux médias modernes (1843-2004), par Thierry Gervais et Gaëlle Morel.
7.
L’esthétique du document- Le réel sous toutes ses formes (1890-2000), par Olivier Lugon.
8.
La création expérimentale- La recherche de nouveaux langages visuels (1917-1980), par Nathalie Boulouch.
9.
La nostalgie du moderne- Le MoMA : institution de la photographie moderniste (1937-2000), par Kevin Moore.
10.
Un art automatique ?- La photographie au cœur des stratégies de l’avant-garde (1915-1975), par Michel Poivert.
Vous avez la possibilité de visualiser plein écran une conférence (en 3 volets) en vidéo donnée au sujet de ce livre. C'est tout simplement ici

dimanche 18 novembre 2007

Colloque : Temps et photographie



Time and Photography / Temps et photographie
Appel à contribution
Date limite : 31 décembre 2007

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Étude interdisciplinaire du médium photographique dans la culture de l’époque contemporaine, insistant sur la réévaluation théorique des notions majeures de temps, d’histoire et de mémoire.
Plus concrètement, le colloque rassemble des chercheurs de différents domaines qui vont proposer leur réponse aux questions suivantes :
- Quels sont les avantages et inconvénients des principaux modèles théoriques permettant l’examen de la notion fluctuante du “temps” en général et de la « contemporanéité » en particulier en photographie?

- Et quels sont les caractéristiques et dimensions d’une taxinomie globale de la description du temps en photographie ?

- Quelles sont les dimensions temporelles de la notion fondamentale d’« index », qui a été jusqu’à présent interprétée presque exclusivement dans un sens spatial?

- Quelles dimensions temporelles de l’image photographique et des pratiques photographiques sont spécifiques au champ, et comment est-il possible de transférer la notion de temps photographique dans les domaines conjoints de la production mécanique, de la reproduction et de la distribution d’images?

- Comment peut-on lutter contre l’idée largement répandue de l’image photographique comme figée, par comparaison à l’image mobile du film?

- Comment peut-on lutter contre l’idée largement répandue du digital comme environnement sans mémoire, et comment l’idée du temps photographique aide-t-elle à interroger de façon nouvelle la notion de temps archival ?

- Quelles sont les conséquences d’un accent majeur placé sur le temps pour une définition globale du champ des études photographiques, c’est-à-dire dans quelle mesure les notions doubles de temps en photographie et de photographie dans le temps élargissent-elles et redéfinissent-elles notre vision globale de la photographie ?


Une proposition de 15 lignes est à envoyer avant le 31 décembre à Jan Baetens.
Le colloque se déroulera du 13 au 15 mars 2008. (langues du colloque: anglais et français).


Scope and content of the conference
This conference is a key moment in the new international cross disciplinary interest in photography in its relationships with time. Until recently, the various approaches of photography and time were elaborated in relative isolation. Among these approaches were: the narratological, poetological and art-theoretical approaches, which study the representation of time in the fixed image and its multiple decodings by an active reader; the historical approach, which considers the photograph a form of historical evidence; and the anthropological approach, which examines the photograph the transformations of the image as a material object through time. The members of the organizing committee, the keynote speakers, and the various contributors, have all published widely not just within one or more of these perspectives, but have encountered within their own research the necessity to theorize the interdisciplinary dimensions of the ongoing work as well as to implement them in new joint research projects, which will be debated during the conference.
The conference tackles the major challenges that have emerged in recent theoretical research in the field of time and photography. Its basic methodological and theoretical framework is interdisciplinary, with a strong focus on philosophically informed art historical interpretations and culturally inspired formal analysis of the photographic image as well as of photography as a social practice. The conference concentrates on the necessity of recovering the balance between the spatial and the temporal, the formally descriptive and the historically interpretive approaches of photography in photography which is no longer restricted to the mere field of artistic photography, but includes a.o. the documentary and the scientific use of the medium.


Responsable :
Université de Leuven
Url de référence :
http://www.lievengevaertcentre.be/
Adresse : Faculté des Lettres 21, Blijde Inkomst B-3000 Leuven

Au nom du postmoderne

Le Postmodernisme ou la logique culturelle du capitalisme tardif, F. Jameson, 2007. ENSBA éditeur, coll. "D'art en questions". Traduit de l'américain par Florence Nevoltry.


Présentation de l'éditeur:
Ce texte capital du célèbre théoricien américain Fredric Jameson, professeur émérite de littérature comparée à Duke University, où il dirige le Centre de Théorie Critique, est pour la première fois traduit en français.Jameson y décrit le postmodernisme comme un ensemble de phénomènes qui succèdent au modernisme, et qu'il analyse comme une étape du capitalisme tardif, «la logique culturelle» de ce dernier.Au delà des enjeux économiques et de tout ce qu'englobe sa vision du postmodernisme, il se penche tout particulièrement sur l'art, l'architecture, la littérature, le cinéma et la vidéo. Ce livre démontre supérieurement l'acuité et la pénétration de ses analyses, son immense culture littéraire et philosophique, son aisance théorique sans égal. Il témoigne aussi de la vision résolument cosmopolite d'un grand penseur dans la tradition de Hegel et de Marx.

Pour lire un compte rendu de cet ouvrage paru dans le quotidien Libération, cliquez ICI
L'incipit du livre:
"Le plus sûr est d'appréhender le concept du postmoderne comme une tentative de penser le présent historiquement à une époque qui, avant tout, a oublié comment penser historiquement. Dans ce cas, soit le postmoderne «exprime» un élan historique profond et irrépressible (sous quelque forme biaisée que ce soit), soit il le «réprime» et le dévie efficacement, selon le côté de l'ambiguïté qui a votre faveur. Le postmodernisme, la conscience postmoderne, pourrait bien alors n'être rien d'autre qu'une théorisation de sa propre condition de possibilité, ce qui se résume, au fond, à une simple énumération de changements et de modifications. Le modernisme, lui aussi, réfléchissait compulsivement sur le Nouveau et cherchait à en observer l'apparition (inventant dans ce but des moyens d'enregistrement et de notation analogues à la chronophotographie historique), mais le postmoderne aspire, pour sa part, aux ruptures, aux événements plus qu'aux nouveaux mondes, à l'instant révélateur après lequel il n'est plus le même; au «moment où tout a changé», comme le dit Gibson ', ou, mieux encore, aux modifications et aux changements irrévocables dans la représentation des choses et dans leur manière de changer. Les modernes s'intéressaient à ce qui pouvait résulter de ces changements et à leur tendance générale : ils réfléchissaient à la chose elle-même, substantivement, de manière utopique ou essentielle. Le postmodernisme est plus formel en ce sens, et plus «distrait» comme aurait pu le dire Benjamin; il ne fait que mesurer les variations et ne sait que trop bien que les contenus ne sont que des images de plus. Dans le modernisme, comme je vais tenter de le montrer plus loin, subsistent encore quelques zones résiduelles de «nature» ou d'«être», du vieux, du plus ancien, de l'archaïque; la culture parvient encore à exercer un effet sur cette nature et oeuvre à transformer ce «réfèrent». Le postmodernisme est donc ce que vous obtenez quand le processus de modernisation est achevé et que la nature s'en est allée pour de bon. C'est un monde plus pleinement humain que l'ancien, mais un monde dans lequel la «culture» est devenue une véritable «seconde nature». En effet, un des indices les plus importants pour suivre la piste du postmoderne pourrait bien être le sort de la culture : une immense dilatation de sa sphère (la sphère des marchandises), une acculturation du Réel immense et historiquement originale, un grand saut dans ce que Benjamin appelait «l'esthétisation» de la réalité (il pensait que cela voulait dire le fascisme, mais nous savons bien qu'il ne s'agit que de plaisir : une prodigieuse exultation face à ce nouvel ordre des choses, une fièvre de la marchandise, la tendance pour nos «représentations» des choses à exciter un enthousiasme et un changement d'humeur que les choses elles-mêmes n'inspirent pas nécessairement). Ainsi, dans la culture postmoderne, la «culture» est devenue un produit à part entière; le marché est devenu absolument autant un substitut de lui-même et une marchandise que n'importe lequel des articles qu'il inclut en lui-même : le modernisme constituait encore, au minimum et tendanciellement, une critique de la marchandise et une tentative pour qu'elle se transcende. Le postmodernisme est la consommation de la pure marchandisation comme processus. Par conséquent, le «style de vie» propre au super-État a le même rapport avec le fétichisme de la marchandise de Marx que les monothéismes les plus avancés avec les animismes primitifs ou le culte des idoles le plus rudimentaire; toute théorie élaborée du postmoderne devrait donc entretenir avec l'ancien concept d'«Industrie de la culture» de Horkheimer et Adorno un rapport un peu du même type que celui de MTV et les publicités fractales avec les séries télévisées des années cinquante.Entre temps, la «théorie» a changé et offre un indice de son cru sur ce mystère. En effet, la façon dont toutes sortes d'analyses tendancielles de types jusqu'alors très différents - prévisions économiques, études de marché, critiques culturelles, nouvelles thérapies, lamentations (en général officielles) sur la drogue ou la permissivité, critiques de manifestations artistiques ou de festivals de films nationaux, cultes ou «renouveaux» religieux -se sont fondues en son sein pour former un nouveau genre de discours, que nous pourrions tout aussi bien appeler la «théorie du postmodernisme», est l'une des caractéristiques les plus frappantes du postmoderne et requiert une attention particulière. Il s'agit clairement d'une classe qui fait partie de sa propre classe, et je ne voudrais pas avoir à décider si les chapitres qui suivent constituent une étude sur la nature de cette «théorie postmoderne» ou n'en sont qu'une simple illustration." .

L'extrême contemporain


Présentation: Si "La Photographie plasticienne: Un art paradoxal" (publié en 1998) se proposait d’examiner les conditions de possibilité de « l’entrée en art » de la photographie, autour des années soixante-dix, et constituait le medium photographique comme l’un des plus puissants opérateurs de déconstruction du modernisme, "Photographie Plasticienne : l’extrême contemporain" (publié en 2004 aux éditions du Regard) se donne pour enjeu l’examen attentif des différents pôles photographiques, souvent contradictoires, de ce qui serait « l’après post-modernisme », emblématisé par les années quatre-vingt-dix : les tropes du banal et de l’intime, la photographie érudite ; l’esthétique de l’idiotie, le sérieux de l’objectivisme issu de l’école de Düsseldorf ; les fictions prométhéennes du post-humain, le renouveau de plus en plus affirmé d’une photographie documentaire qui ne doit plus rien à un photojournalisme frappé d’obsolescence, mais peut a contrario se comprendre en écho aux stratégies iconiques du « retrait ». Dans un champ photographique éclaté, qu’il serait illusoire de vouloir unifier au détriment des différences et des fractures, l’auteure a conjointement mis en exergue les questionnements propres à l’extrême contemporain : soit l’impossibilité du paysage et la crise de l’urbanité, l’émergence de «non-lieux» et la tentative pour inventer des lieux où vivre, d’une part ; l’inquiétude du sujet vis-à-vis de lui-même, d’autre part, comme si le portrait, loin d’être une évidence, achoppait sur une identité toujours plus précaire, qui fut déjà soumise à l’implacable déconstruction structuraliste du sujet. Au terme du parcours, c’est à une lecture subjective - et revendiquée comme telle - des œuvres que le lecteur sera convié : constituer l’admiration comme passion joyeuse, active, nietzschéenne enfin. (Texte publié avec l’aimable autorisation des éditions du regard) .
L’auteur Dominique Baqué, ancienne élève de l’Ens, agrégée de philosophie et maître de conférence à l’université Paris VIII, est l’auteur de nombreux textes portant sur la question de l’image en général, et de la photographie en particulier. Écrivain, elle a notamment publié un essai sur Maurice Tabard (Belfond, 1991), Les Documents de la modernité (Jacqueline Chambon, 1993), La Photographie plasticienne : un art paradoxal et Mauvais Genre(s) (Éditions du Regard, 1998 et 2002). Elle signe également la chronique "Photographie" de la revue Art Press.

Sommaire:
Avant-propos
Le trope du banal
Trash, dérision et idiotie : infléchissement de l’esthétique du banal
Paradoxes et apories de l’intime
À rebours : scénographies de la culture
De l’impossible paysage aux non-lieux de l’extrême contemporain
Identifications d’une ville
Pour un lieu où vivre ?
Le sujet inquiet de lui-même
Fictions prométhéennes du post-human
Stratégies du retrait, renouveau du documentaire
En guise d’épilogue : admirations

vendredi 16 novembre 2007

Purpose Webmag N°6

Il est entendu que la photographie entretient des rapports étroits avec la mémoire. On a tant écrit sur les notions de trace, d'empreinte, d'index… À juste titre, le pouvoir documentaire de l'image photographique a été mis en évidence. On a peut-être moins insisté sur le fait que la mémoire opère un travail, longtemps après la production des images et leur diffusion. Loin d'être figée, elle participe aux mouvements de l'histoire, personnelle ou collective, que nous portons comme un emblème et un fardeau, et qui est la part fondamentale de notre identité.
L'imagerie mentale qui nous accompagne dresse la carte mouvante de nos fantasmes, de notre culture, et s'enrichit sans cesse de nos rencontres. Nous collectons et archivons les images qui se redistribuent en réseau. Des connections s'établissent, font sens : les idées prennent vie.
Intimité du souvenir, Histoire, collection aide-mémoire, documents d'artistes, mémoire du corps, archéologie, action du temps, immuabilité… Autant d'aspects évoqués par les auteurs présentés dans ce sixième numéro de purpose. Que ces artistes soient vivants ou morts, leurs images se rencontrent et nous invitent à parcourir les méandres de la mémoire.

Ce numéro 6 du web magazine Purpose nous propose les dossiers photos suivants:
Brigitte Lustenberger What You See

Carlo Mollino Villa Zaira
Fulvio Rosso La pelle dell'anima
Yves Klein Obsession de la lévitation
Angelo Mosca Parigi val bene una messa
Françoise Huguier J'avais huit ans
Marc Garanger Identification d'une guerre
Hervé Jézéquel De mémoire de pierre
Unité INSERM U913 Imagerie du Système Neuronal Entérique
Musique de / music by Éric Cordier

Je vous invite donc à feuilleter et à déambuler entre les albums de ces dossiers photographiques en cliquant ici

Pour les plus curieux, cliquez sur archives pour accéder et visualiser les numéros précédents.

mercredi 14 novembre 2007

Le diaphragme


L’appareil photographique doit beaucoup de sa séduction au diaphragme à iris qui ajoute au trou rond de l’objectif un organe délicat, subtil et d’une vivante ingéniosité. C’est une corolle de lames métalliques qu’on peut éloigner ou rapprocher de son centre, augmentant ou diminuant ainsi l’ouverture utile de l’objectif. Il y a de la rose dans ce dispositif, une rose qu’on peut à volonté fermer ou épanouir.Ce n’est pas tout. A cette troublante anatomie, le diaphragme ajoute une physiologie d’une très vaste magique portée. Car tous les photographes savent qu’en fermant le diaphragme on diminue l’entrée de la lumière dans la chambre noire, mais qu’on augmente en revanche la profondeur de champ. Inversement, en augmentant son diamètre, on perd en profondeur de champ ce qu’on gagne en clarté. Rien de plus universel en vérité que ce dilemme qui oppose profondeur et clarté, et on oblige à sacrifier l’une pour posséder l’autre. On appartient à l’un ou à l’autre de deux types d’esprits opposés selon que l’on choisit la clarté superficielle ou la profondeur obscure. « Le défaut majeur des français, disait mon maître Eric Weil, c’est la fausse clarté ; celui des allemands, c’est la fausse profondeur ». C’est naturellement dans le portrait que l’option devient la plus urgente. En diaphragmant plus ou moins, on donne plus ou moins d’importance aux plans éloignés qui se trouvent derrière le sujet, et tout ce qui est accordé d’attention à ces arrière-plans est refusé au sujet portraituré. Si la Joconde avait été photographié par Leonard de Vinci, il aurait à coup sûr fermé au maximum - un trou d’aiguille - puisque derrière ce visage au sourire célèbre, on distingue parfaitement un lointain paysage avec ses rocailles, ses arbres et ses lacs. Encore faut-il que ce "fond" - qu’il soit rural ou urbain, intime ou architectural - ait une existence propre et ne se réduise pas à quelques attributs attachés symboliquement à une figure humaine centrale, comme par exemple les arbres du Paradis flanquant le couple Adam et Eve, ou le château dont la silhouette crénelé se découpe derrière le portrait d’un seigneur. Il faut au contraire qu’il ait une présence autonome assez forte pour concurrencer celle du ou des personnages menacés à la limite d’être « avalés » par la paysage où ils ne joueront plus que le rôle modeste d’éléments humains à côté de la faune et de la flore. Dès lors, la présence ou l’absence d’un décor d’arrière-plan prend une signification de vaste portée dont on retrouve l’équivalent en littérature, voire dans les sciences humaines. Car il n’est pas indifférent dans un roman que le héros soit décrit lui-même, abstraction faite de ses origines ou de son milieu, sur fond indifférencié - à diaphragme ouvert - ou au contraire à diaphragme fermé, replacé dans un ensemble socio-historique dont il est solidaire et où il puise sa signification. Si l’on parcourt les grands romanciers français du XIXème siècle - Stendahl, Balzac, Flaubert, Hugo, Maupassant, Zola - on constate que l’ouverture du diaphragme varie de l’un à l’autre et qu’elle a très grossièrement tendance à diminuer. Le personnage présenté par Stendhal sans son milieu ou en contradiction avec ses origines - Julien Sorel - s’y intègre au contraire profondément avec Zola pour n’être plus qu’une des données du milieu social, lequel constitue le véritable sujet de l’étude romanesque. Stendhal : f4 ; Zola : f16.


Michel Tournier, Petites proses, Gallimard, Folio n° 1768, pages 140-142.


Pour voir à quoi ressemble un diaphragme, cliquez ici

mardi 13 novembre 2007

Lettres et photos d'Egypte



Présentation de la quatrième de couverture :

« Plus d'un siècle après le voyage en Egypte de Gustave Flaubert et de Maxime Du Camp, deux amis, l'un écrivain, l'autre photographe, remontent le Nil, du Caire à Assouan, avec le projet d'écrire un livre qui mêlera textes et photographies. Naturellement, le projet évolue durant le voyage. Et il n'est publié que bien longtemps après... Peut-être plus qu'à une ‘visite’ de l'Egypte, c'est au sens du voyage aujourd'hui que nous convoque le dialogue entre les photographies intimistes du regardeur et les lettres que l'écrivain rédigea (sans les leur expédier...) pour ses amis restés en France. Les correspondants deviennent des acteurs d'un périple qui ignore les tour operators et les circuits obligés pour révéler, entre plaisir et exaspération, un mode singulier de la découverte. La succession des lettres, qui respecte leur chronologie, organise une progression dramatique et sensible du récit pendant que les photographies, en contrepoint, choisissent l'Egypte comme cadre pour un portrait amical d'Hervé Guibert. »

Extrait :« Assouan, le 26 mars 19..A qui ? Il y a dans l’oasis des solitudes pleines de félicité : un enfant au milieu des palmes, un trait blanc vivant dans ces fameux verts, il vient de se laver, il fera galoper son âne, pour l’instant seul un oiseau blanc lui rend visite. Il achève son travail : il attrape à bras-le-corps un morceau d’oasis, il l’arrache, il le charge sur son âne et il le traîne dans le désert, sans autre raison que de le raviver. Qui donc j’embrasse si ce n’est lui ? »

Hervé Guibert, Hans Georg Berger, Lettres d’Égypte : du Caire à Assouan, 19.., Arles, Actes Sud, 1995, p.65.

Pour plus d'informations sur l'oeuvre hybride (textes et photographies) d'Hervé Guibert, allez voir par ici

mercredi 7 novembre 2007

Approche d'un tableau


Une rétrospective Gustave Courbet (1819-1877) se tient actuellement jusqu'au 28 janvier au Grand Palais. Courbet, chef de file de l'école réaliste , nous offre un travail bien enraciné dans son terroir et bien nourri de son engagement politique.
Son tableau de 1854 " Les cribleuses de blé " est représentatif de ce volet important de sa peinture. Une analyse en fonction du contexte historique est disponible ici

lundi 5 novembre 2007

L'ultime image



Présentation du dernier roman de Laurent Graff : Cela sonne comme un arrêt : la dernière photo. Comme il y a le dernier verre, le dernier jeton ou l’ultime message. Graff invente la forme neuve de la roulette russe : l’objectif à l’œil, comme le canon tout contre la tempe. On presse : y a-t-il une vie, passé le couperet de l’ultime clic ? Jeu, set et match ? Neigel, le héros, se cogne à tous les angles d’un deuil amer, celui de M. Un jour à Rome, Méphisto, entendez un sieur Giancarlo Romani (un homme que l’humain intéresse, ex-prêtre) lui offre un voyage et un appareil photographique. Règle du jeu : clore la bobine en prenant « la dernière photo ». Il n’est pas seul à jouer : d’autres sont là, comme lui, avec leur dernière case à cocher : un Japonais, maître-pêcheur de carpe, un ex-mannequin et Eros (de Bilbao). Alors, que prendre dans les rets du viseur ? Une photo qui tout résumera, apocalypse intime, une photo pour rien, une photo de rien, un souvenir à loger au coin d’un miroir, un fragment d’idéal. Geste dérisoire, simple pression, mais choix décisif. Chacun choisira de prendre ou de ne pas prendre LA photo. Neigel, lui, en fera un rendez-vous fantomatique, une hallucination douce, en reviendra plus léger.Tout cela semble bien innocent. Vraiment ?
Extrait: "J'ai cessé de prendre des photos il y a vignt ans, après la mort de M. J'avais à l'époque un Mamiya 35 mm de bonne tenue; je faisais uniquement de la couleur. Je remplissais des alblums entiers. Partout où nous allions -dès que son état de santé le permettait, nous partions en escapade-, j'emportais mon appareil. Je fixais sa présence et en tirais une image, comme pour arrêter ou ralentir le temps, l'empêcher, comme des bâtons dans les roues. Chaque photo était une carte abattue dans la bataille que nous livrions. M. est morte un jeudi, le 7 septembre. J'ai rangé mon appareil et je ne l'ai plus ressorti.
La photographie, aujourd'hui, a perdu beaucoup de son âme avec l'avènement des appareils numériques. Les photos n'ont plus ce caractère crucial et définitif qu'elles avaient du temps de la photographie argentique. Bonne ou mauvaise, une photo était irrévocable et était décomptée de la pellicule. Le développement du film révélait de manière implacable, dans l'ordre chronologique, images réussies et images ratées; impossible d'échapper à la sentence et aux statistiques. Même s'il était toujours permis de multiplier les photos et de renouveler la pellicule, chaque prise de vue avait une valeur unique, et représentait un petit miracle. La dernière photo avait un statut distinct, une saveur particulière. Bien souvent, elle était bâclée, expédiée, pour en finir au plus vite; mais parfois, elle était, au contraire, retardée, soignée, calculée, pour finir en beauté. Alors, on rembobinait.
A la mort de M., il restait quelques photos dans l'appareil. Je les ai prises en fourrant le boîtier sous un oreiller, comme on vide une bouteille dans un évier, pressant le déclencheur en aveugle.
Lien: je vous invite à cliquer sur le terme vidéo pour suivre un entretien de l'auteur à propos de son dernier roman.

dimanche 4 novembre 2007

Moroccan Graffiti

Moroccan graffiti

Exposition photographique de Thami Benkirane
Du jeudi 8 novembre au samedi 29 décembre 2007
à la galerie de l’institut français de Fès

Vernissage le jeudi 8 novembre à 18 H 30




Cette série de photographies se fonde sur l’esthétique de la « troisième image ». Celle qui résulte, lors d’un diaporama, de la projection en fondu enchaîné de deux images.
Techniquement, cette écriture photographique qui évoque le palimpseste (cliquez sur ce terme pour saisir sa signification) repose sur la surimpression d’images directement à la prise de vue sur film argentique.
L’auteur éprouve un attachement sensible et sensuel à la matière rebut, aux graffitis oblitérés ou tenaces, aux fragments d’affiches lacérées, à la rouille, au délabrement des murs, à la ruine… et à tout ce qui révèle l’implacable travail d’érosion du temps.
Cette alchimie coloriste et plastique de la troisième image donne lieu à des rencontres formelles et graphiques dont le décalage par rapport à la réalité bouleverse notre sensibilité visuelle habituelle.

jeudi 1 novembre 2007

Lectures à la clef...





A la faveur de la lecture entamée cette semaine de la nouvelle de Michel Tournier intitulée "Les suaires de Véronique", j'ai évoqué les écrits de cet auteur majeur de la littérature française contemporaine et en particulier ses essais où il a associé texte et image. Par exemple, c'est dans Le "Tabor ou le Sinaï"(1988) qu'il a consigné ses reflexions sur la peinture. La photographie est convoquée dans "Des clefs et des serrures" (1979), "Vue de dos" (1981), "Rêves" (1979).

"Petites proses" (1986) nous donne à lire des textes parus dans Des Clés et des Serrures et le "Vagabond immobile" (recueil de réflexions parus en 1984).



Dans un passage de la nouvelle "Les suaires de Véronique", l'auteur évoque certaines conceptions esthétiques relatives au nu. Je vous invite en cliquant ici à prolonger significativement votre lecture.
Le texte qui va suivre (et que j'illustre avec l'une de mes images) est extrait de son essai "Des clefs et des serrures" et il est intitulé "L'esprit de l'escalier":

"Dans la structure imaginaire privilégiée que constitue la maison, Gaston Bachelard attribuait un rôle fondamental au grenier et à la cave. A la maison toute de plain-pied, comme à l’appartement qui en est l’équivalent, il manque une dimension importante, la dimension verticale avec l’acte de monter et de descendre qui lui correspond. Cette dimension verticale, c’est l’escalier qui la matérialise, et plus particulièrement ces deux escaliers antithétiques et complémentaires : celui qui descend à la cave et celui qui monte au grenier, car, notez-le bien, on descend toujours à la cave, et on monte toujours au grenier, bien que la logique la plus élémentaire exige aussi l’opération inverse.Or, si ces deux escaliers ont en commun un certain mystère et l’inconfort de leur raideur, ils possèdent des qualités bien différentes par ailleurs. Le premier est de pierre, froid, humide, et il fleure la moisissure et la pomme blette. L’autre a la sèche et craquante légèreté du bois. C’est qu’ils anticipent chacun sur les univers où ils mènent, lieu d’obscurité et de durée épaisse, maturante et vineuse de la cave, ciel enfantin et poussiéreux du grenier où dorment le berceau, la poupée, le livre d’images, le chapeau de paille enrubanné.Oui, c’est bien cela : l’escalier est anticipation du lieu où il mène, et cette anticipation atteint son degré le plus ardent lorsqu’il monte de la salle du tripot à la chambre de passe et s’emplit des balancements d’une robe outrageusement échancrée et parfumée.On devrait instituer une société protectrice des escaliers. L’architecture misérabiliste qui les supprime ou les réduit à la portion congrue est déplorable. Les tours gigantesques se condamnent elles-mêmes en rendant invisibles les ascenseurs, ces ludions funèbres, ces cercueils verticaux et électriques. Une vieille loi de l’urbanisme, ou de l’urbanité ? voulait qu’une volée de marches n’excédât pas le nombre de vingt et un d’un palier à l’autre. C’était la mesure humaine.Il est vrai qu’il y a aussi l’escalier inutile, absolu, monumental et solennel. Celui-là ne connaît pas de mesure. Maître de la maison, il exige souverainement ces deux choses que le monde moderne tend de plus en plus à nous refuser : l’espace et l’effort.L’espace, le grand escalier d’apparat, déployé comme un vaste éventail, le dévore à belles dents. Dans un palais, il revendique le principal, le centre, il rêve visiblement de tout prendre, d’envahir la totalité du volume intérieur. Il nous suggère de vivre sur ses marches, de dormir sur ses paliers. Et il prend tout en effet sur la scène du Casino de Paris ou des Folies Bergère lorsqu’il étale, comme un immense et profane reposoir, les chairs les plus avenantes, somptueusement déshabillées. Mais monter un escalier est dur, le descendre périlleux. Qui ne se souvient du cri de défi de Cécile Sorel au terme du dangereux exercice que lui imposaient sur scène ses falbalas et ses cothurnes de strass :

« L’ai-je bien descendu ? »"



Dans la même veine, je vous invite à lire le texte qui donne son titre à l'ouvrage en question en allant le chercher ici